Le ver gris occidental des haricots, un ravageur sous haute surveillance!​​​​​

Stéphanie Mathieu, agronome
Direction régionale de la Montérégie-Ouest du MAPAQ


​Le ver gris occidental des haricots (VGOH) est un ravageur qui a connu une expansion rapide vers le nord-est de l’Amérique du Nord à partir de 1999. Il a été trouvé pour la première fois au Québec en 2009 et, depuis ce temps, les captures de ce papillon sont en augmentation. En 2016, les premiers dommages d’importance économique ont été observés dans des champs de maïs à Saint-Anicet, en Montérégie.

Biologie, dépistage et stratégie d’intervention

Les papillons arrivent, portés par les vents, vers la fin du mois de juillet. Ils pondent de préférence dans les champs de maïs dont les croix sont soit dans le cornet, soit tout juste sorties. Les œufs sont déposés sur la partie supérieure des feuilles de maïs situées de l’épi jusqu’au haut du plant. Après l’éclosion, les larves se déplacent tout en s’alimentent de pollen et se dirigent vers les soies, puis dans les épis. Elles y restent jusqu’à la mi-septembre, puis se jettent au sol pour s’y enfouir. Des pertes de rendement peuvent survenir à cause des grains mangés par les larves et potentiellement en raison de la présence de moisissures sur l’épi. La qualité du grain peut d’autant plus être compromise s’il y a production de vomitoxines.​

Le réseau de pièges à phéromones mis en place par le groupe des grandes cultures du Réseau d’avertissements phytosanitaires (RAP) permet de déterminer l’arrivée des premiers papillons et d’entreprendre le dépistage des masses d’œufs. On recommande d’inspecter les champs de maïs qui ont atteint un stade propice à la ponte et qui présentent les facteurs de risque suivants : un sol sableux, une monoculture de maïs, une croissance inégale de la culture et des antécédents connus quant à la présence du VGOH. Les semis tardifs sont plus à risque, puisque le synchronisme entre la présence des papillons et le stade du maïs est un facteur important pour la ponte.

La méthode de dépistage consiste à examiner 100 plants de maïs, soit 10 plants consécutifs par rang à 10 endroits bien répartis dans le champ. Aucun seuil d’intervention n’a été établi pour le Québec. Le seuil économique d’intervention utilisé est celui du ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario (OMAFRA). Il est atteint lorsque 5 % des plants sont porteurs de masses d’œufs. Le seuil est cumulatif : par exemple, le seuil de 5 % sera atteint si l’on observe 2 % et 3 % des plants ayant une masse d’œufs respectivement aux premier et deuxième dépistages. Un dépistage doit être fait tous les cinq, six ou sept jours en fonction de la météo. Plus la température est élevée, plus les œufs risquent d’éclore rapidement.


La quantité de papillons dans le piège n’indique pas l’atteinte du seuil d’intervention. Elle met plutôt en évidence la présence du VGOH dans le secteur et permet de distinguer les champs à risque et de les dépister. Le suivi des champs effectué au cours des dernières années permet d’affirmer qu’il n’est pas possible de juger des risques de dommages dans un champ sur la base du nombre de captures dans un piège situé en bordure de ce même champ.

Une fois établie l’atteinte du seuil d’intervention sur la base du dépistage des œufs, il peut être rentable de recourir à un insecticide foliaire. Par contre, il faut procéder au traitement lorsque la majorité des œufs ont éclos. La fenêtre d’intervention est très courte : l’insecticide doit entrer en contact avec les larves avant que celles-ci ne pénètrent à l’intérieur des soies.
 
Légende​ : stratégie d'intervention contre le VGOH, tirée de la vidéo « Le Ver-gris occidental des haricots : biologie, dépistage et stratégies d'intervention » (RAP Grandes cultures, 2018).

 
Le VGOH a des ennemis naturels tels que certaines punaises prédatrices, les coccinelles et les oiseaux qui se nourrissent des larves. Les chauves-souris seraient aussi de grandes consommatrices des papillons en vol la nuit. Puisque les insecticides ont des répercussions sur la biodiversité des champs, il est primordial de s’assurer de l’atteinte du seuil d’intervention avant de recourir à cette solution.
 
Une autre option pour la protection du maïs contre les larves du VGOH est de nature technologique et met à profit la protéine Vip3A contenue dans certains maïs hybrides Bt. Les autres méthodes liées aux hybrides Bt, par exemple la protéine Cry1F, ne sont pas efficaces contre le ravageur. Quant aux moyens associés à la lutte biologique, des essais du RAP sont en cours pour évaluer l’efficacité des trichogrammes dans le contrôle du VGOH.

Dans l’optique où les interventions seront plus fréquentes, il sera primordial de varier les moyens de lutte, de manière à éviter le développement de la résistance.

Survie hivernale sous nos conditions

La survie à l’hiver du VGOH sous les conditions du Québec a été confirmée en 2019 par un travail de recherche du RAP dirigé par le chercheur du Centre de recherche sur les grains (CEROM), M. Julien Saguez, biologiste et entomologiste, en collaboration avec les conseillers de la Montérégie, du Centre-du-Québec et de l’Outaouais du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Les essais se poursuivent pour mieux comprendre l’incidence de la génération hivernante sur les pics de captures.

Impact sur les rendements

Les répercussions du ravageur sur les rendements de maïs-grain au Québec sont encore peu documentées. Selon l’OMAFRA, la présence d’une larve de VGOH par plant entraîne une baisse de rendement de 225 à 940 kg/ha. Pour une même densité de population, l’Université du Nebraska indique une baisse de 247 kg/ha. Les dommages varient d’un champ à l’autre en fonction de l’hybride, de l’année, etc. Parfois, la larve se nourrit au bout de l’épi, sur la rafle, et ne cause presque pas de dommages.

Quant au maïs-ensilage, la préoccupation des toxines surpasse celle de la baisse de rendement. En effet, les trous et les galeries creusés dans les épis par le VGOH peuvent constituer des portes d’entrée pour des champignons tels que Fusarium graminearum, qui causent les vomitoxines. Toutefois, la présence de moisissures ne signifie pas nécessairement la présence subséquente de toxines dans le grain. Si un champ est touché par le VGOH, on recommande de le récolter le plus rapidement possible et d’entreposer le maïs dans d’excellentes conditions pour éviter le développement des mycotoxines. Il faut aussi mettre en perspective le fait qu’il y a beaucoup de facteurs autres que le VGOH qui peuvent avoir des conséquences sur la qualité de l’ensilage, comme le précédent cultural, le drainage, l’entreposage, etc.

Des moyens de prévention peuvent être mis en œuvre pour diminuer les risques d’avoir des dommages causés par l’insecte : éviter la monoculture de maïs, sélectionner des hybrides de maïs tolérant la fusariose, favoriser une levée uniforme… et, surtout, faire le dépistage des champs!

​Pour plus d’information, on peut regarder la vidéo « Le ver-gris occidental des haricots : biologie, dépistage et stratégies d’intervention » ou consulter la fiche technique « Le ver gris occidental des haricots dans le maïs (grain et ensilage) » du RAP.


Captures des papillons de VGOH en fonction des années.


Texte intégral : journal Gestion et technologie agricoles (GTA), 5 mars 2020​
 
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Dernière mise à jour : 2020-03-09

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