Le pissenlit : comment s'en débarrasser?

Saviez-vous qu’en 1925, le gouvernement du Canada a produit une brochure sur la culture du pissenlit, encourageant la production de ses racines pour la consommation humaine? Aujourd’hui, une telle promotion nous apparaît plutôt cocasse alors que cette mauvaise herbe vivace et envahissante est si mal aimée. La question qui se pose maintenant : comment l’éradiquer?

Même si on retrouve le pissenlit partout en juin, on parle bien peu de son contrôle dans les prairies et les pâturages. On se préoccupe trop peu du seuil de nuisibilité comparativement à d’autres mauvaises herbes. Comme il n’est pas toxique et que les vaches l’apprécient, cela rend-il le pissenlit moins problématique? Pourtant, plus il y en a dans un champ et plus les rendements fourragers seront bas.

En plus d’être la mauvaise herbe vivace la plus détestée par les amateurs de gazon impeccable, le pissenlit est synonyme, en agriculture, de baisse de rendement fourrager lorsqu’il est trop présent. De plus, il prolonge la durée de séchage du foin lorsqu’il est en pleine floraison et ses tiges laiteuses, qui portent les fleurs, nuisent à une bonne fermentation de l’ensilage. Ces problèmes ne se posent plus après la floraison, comme la plante présente uniquement des feuilles.

Avis à ceux qui veulent le contrôler : voici quelques moyens bien simples pour éviter de le voir s’implanter dans les prairies et, dans le cas des pâturages, pour le faire disparaître.

La rotation de paissance

Les vaches broutent bien le pissenlit puisque ses feuilles ont bon goût, contrairement à d’autres mauvaises herbes comme le chardon, l’épervière et le bouton d’or. Peu d’entre vous le savent, mais vos vaches peuvent travailler avec vous pour l’éradiquer.

Avant leur floraison, les plants de pissenlit produisent une rosette de feuilles au niveau du sol. Ainsi, pour les faire disparaître, faites-les brouter par vos vaches avant la fin mai, pendant les 20 jours qui précèdent la floraison. Elles arracheront les feuilles entières avec leur langue. Après 15 à 20 jours, une repousse de feuilles apparaît et il faut alors faire vite : les vaches doivent brouter ces nouvelles feuilles rapidement. Si vous attendez plus de 25 à 30 jours pour cette deuxième paissance, les plants de pissenlit persisteront durant toute la saison de végétation.

La régie de paissance

Il faut éviter une paissance de plus de 7 jours, car cela affecte la persistance des plantes fourragères. Durant ce laps de temps, elles produisent leurs premières nouvelles feuilles : si les vaches les broutent dès qu’elles apparaissent, les plantes fourragères meurent, puisqu’elles n’ont plus de réserves. Ceci crée un espace vacant et les graines de pissenlit en profitent alors pour germer.

La fauche des prairies

Chaque fleur de pissenlit peut produire jusqu’à 150 graines et un plant peut générer jusqu’à 5 000 graines. En plus, facilement transportées par les aigrettes, les graines peuvent se répandre jusqu’à 30 kilomètres plus loin!

Il est donc important de faucher la prairie avant la formation des graines. Lorsqu’on le fait à plus de 4 pouces, les plantes fourragères connaissent un regain plus rapide, ce qui évite la propagation du pissenlit.

Les espèces fourragères

Au printemps, lors de la première année de production fourragère, la luzerne pousse plus lentement que les graminées fourragères et elle couvre moins bien le sol. Voilà des conditions qui favorisent l’implantation de nouveaux plants de pissenlit. Ainsi, plus le mélange fourrager est composé de luzerne, plus le pissenlit s’implante facilement.

Par la suite, la luzerne peut disparaître en raison de la gestion des coupes de l’automne précédent ou d’un hiver trop rude. Voilà tout un avantage pour le pissenlit! Ses nombreuses graines en profitent pour germer et occuper ces espaces vacants.

Il faut donc éviter un trop fort pourcentage de luzerne dans le mélange servant à ensemencer les prairies et préférer des graminées à croissance rapide au printemps (fétuque élevée, festulolium, raygrass ou dactyle), qui donnent le plus de fil à retordre au pissenlit. Toutefois, le raygrass et le festulolium ne survivent pas bien des années; dès qu’ils disparaissent, les espaces ouverts à l’ensoleillement permettent au pissenlit de s’implanter.

La fertilisation au potassium

Un sol riche en potassium favorise une bonne croissance du pissenlit. Ainsi, plus on fertilise le champ avec du fumier riche en cet élément fertilisant, plus on favorise la croissance de cette mauvaise herbe. Les plants de pissenlit sont alors plus gros et plus productifs en graines.

La fertilisation à l'azote

L’un des meilleurs trucs de régie contre le pissenlit est une fertilisation à base d’engrais azoté au printemps à une dose de 30 à 40 kg d’azote par hectare. Vous pouvez choisir l’urée, un engrais moins dispendieux du fait qu’il libère de l’azote sur une plus longue période, ce qui favorise la croissance des graminées. L’azote contenu dans l’urée risque davantage de s’évaporer à la suite d’une application par temps ensoleillé, mais le nitrate comporte aussi un désavantage, soit de se faire lessiver plus facilement dans les sols gorgés d’eau au printemps.

On rentabilise la fertilisation azotée printanière de la prairie du fait que le pourcentage de protéines du fourrage augmente et que l’invasion de graminées fourragères indigènes, comme la fétuque rouge et le pâturin des prés, diminue.

Néanmoins, soyez vigilants! Dans les prairies où une bonne partie de la luzerne n’a pas survécu à l’hiver et où il y a déjà trop de pissenlits, l’apport d’azote peut occasionner l'effet inverse en aggravant la disparition de cette plante fourragère et en donnant un avantage au chiendent, s’il est déjà présent.

La compaction des sols et le pH

La surabondance des pissenlits est un indice de compaction des sols puisque leurs racines pivotantes leur permettent de s’installer plus facilement que l’ensemble des plantes fourragères. On remarque qu’un faible pH accentue ce problème et qu’un pH inférieur à 6 affecte la persistance des plantes fourragères ensemencées, qui laissent des espaces vacants pour la germination des pissenlits.

Le vasage

Tôt au printemps, un conseiller peut évaluer la persistance des plantes fourragères plus vulnérables aux conditions hivernales, comme le festulolium, le raygrass, la luzerne et le trèfle rouge. Cela permet de valider s’il faut réensemencer rapidement par un semis à la volée ou par un semis direct. Il faut éviter que le pissenlit s’installe avant les plantes fourragères, car nul doute qu’il s’imposera si un espace au soleil se libère.

En résumé…

Pour restreindre l’infestation du pissenlit, une bonne couverture du sol par les plantes fourragères de type graminée est essentielle. Pour ce qui est du sol, un pH adéquat, une bonne structure et une fertilisation azotée au printemps favorisent la croissance rapide des graminées fourragères, qui concurrencent alors plus efficacement les nouveaux plants de pissenlits.

Dans les pâturages, voici la régie à privilégier :

  • des rotations de moins de 20 jours au printemps 
  • des paissances de moins de 7 jours en continu
  • une densité animale acceptable.


Dans les prairies, il est préférable :

  • de choisir des plantes fourragères compétitives 
  • d’avoir recours à des mélanges fourragers contenant davantage de graminées
  • de suivre un calendrier de fauche favorisant la persistance des plantes fourragères
  • d’assurer un suivi de leur survie au printemps pour intervenir rapidement avec du vasage, au besoin.

France Bélanger, agronome
Conseillère en développement régional

Ne pas remplir ce champs

Dernière mise à jour : 2021-12-10

Menu de bas de page

Aller au Portail du gouvernement du Québec
© Gouvernement du Québec, 2024