Le monde agricole est en constante évolution, tout comme les façons de s'établir. Bien qu’acquérir graduellement une entreprise existante demeure le mode d’établissement le plus fréquent, d’autres stratégies peuvent être choisies, dont certaines qui sont encore peu connues.
Selon le recensement de la relève agricole de 2011, en Chaudière-Appalaches, 64 % de la relève a eu recours au transfert familial pour s’établir en agriculture. D’autres optent pour la location d’actifs agricoles ou la signature d’un contrat avec un intégrateur (tableau). On remarque aussi que, de plus en plus, la relève s’établit en démarrant sa propre entreprise ou en créant une entreprise agricole en parallèle.
Parmi ce lot de possibilités, quel mode d’établissement vous convient le mieux?
L’acquisition graduelle d’une entreprise existante
Commençons par évaluer l’option la plus fréquente, soit l’acquisition graduelle d’une exploitation agricole. Cela consiste à acquérir de manière progressive les actifs de l’entreprise d’un producteur agricole (le cédant). Avec le temps, la relève assume de plus en plus de responsabilités quant à la gestion et à l’exploitation de l’entreprise existante. Notons que cette stratégie peut être combinée à d’autres méthodes, notamment la location-achat ou l’intégration.
Les conditions de succès : pour réussir, il faut communiquer, faire du maillage, être bien accompagné et surtout, bien planifier son projet. En établissant vos objectifs personnels et professionnels, vous ciblerez mieux les actions à entreprendre ainsi que les responsabilités et les tâches de chacun.
À retenir : pour être transférée adéquatement, l’entreprise doit présenter une bonne viabilité économique sans être trop endettée. N’oublions pas que la transférabilité de la ferme dépend de la volonté du propriétaire de céder son entreprise, mais aussi d’une bonne planification avant le transfert.
Le démarrage d’une entreprise
Autre option : la relève démarre son entreprise en créant une nouvelle entité juridique. Elle achète des biens agricoles existants (bâtisses, terres, etc.) ou planifie la construction de nouveaux bâtiments.
Les conditions de succès : encore une fois, la planification est le mot d’ordre! Bien définir vos objectifs et élaborer un plan d’action vous permettront d’obtenir les résultats escomptés. Il faut surtout que vous maîtrisiez votre projet afin d’obtenir du financement, tout en ayant un bon plan d’épargne.
À retenir : en créant une nouvelle entreprise agricole, vous ne pouvez profiter de l’expérience et des savoirs transmis par un propriétaire cédant. Il faut donc nouer des relations avec des agriculteurs et des intervenants de votre secteur pour vous donner les meilleures chances de succès.
La création d’une entreprise parallèle
Vous pouvez fonder une entreprise en étroite collaboration avec une exploitation agricole existante (entreprise mère). Cette dernière soutient l’entreprise parallèle de manière importante, que ce soit sous la forme d’un financement, d’un prêt de machinerie ou d’une mise en commun des ressources humaines. Toutefois, les deux entreprises sont des entités juridiques distinctes; elles peuvent même exploiter des secteurs de production tout à fait différents.
Les conditions de succès : La réussite de cette option repose surtout sur la bonne relation d’affaires qu’entretiennent les entreprises mère et parallèle. Une convention officialise ce lien. L’entreprise mère doit offrir un accompagnement de qualité à son « protégé » afin de concourir à son succès.
La location-achat d’une entreprise
La relève agricole qui opte pour la location-achat veut acquérir une partie des actifs d’une entreprise, mais en tirant plutôt profit de la location. Il existe plusieurs types de location-achat; toutefois, les terres et les bâtiments s’avèrent les actifs les plus couramment loués.
Les conditions de succès : pour conclure une entente de location, le locateur et le locataire doivent faire preuve de confiance et de respect. Les deux parties doivent s’entendre sur tous les aspects de la location, au-delà du montant du loyer. Il faut considérer tous les éléments susceptibles d’entraîner des conflits et éliminer toute forme d’ambiguïté. Vous le verrez: il est important, voir essentiel, de consulter un notaire ou un avocat à cet effet et de rédiger un contrat de location adapté à vos besoins.
À retenir : avant de signer un contrat pour la location d’une terre, tenez compte de la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles et de la Loi sur la protection de l’environnement et des lois fiscales. Vous éviterez ainsi les mauvaises surprises…
L’intégration contractuelle
Bien qu’il existe plusieurs types d’intégration, les principaux sont l’intégration contractuelle et l’auto-intégration.
Dans le premier cas, le producteur et celui que l’on nomme communément «l’intégrateur» sont liés par un contrat qui spécifie entres autres les caractéristiques des produits et les rendements escomptés. L’avantage de cette façon de faire réside dans le partage des risques entre les deux parties. De plus, les producteurs accèdent à différents services, à des données de production et à des résultats d’études rendus disponibles par l’organisation qui soutient l’intégration.
Dans le cas de l’auto-intégration, une organisation acquiert en totalité l’entreprise et le producteur devient alors davantage un gérant qu’un entrepreneur. Toutefois, ce parcours mène rarement à un établissement réel, à moins d’avoir une entente particulière avec l’intégrateur. En fait, seule l’intégration contractuelle est considérée comme un établissement en agriculture.
Les conditions de succès : Gage de réussite, le contrat? Certainement, à condition qu’il précise les attentes de chaque partie et qu’il assure une rémunération appropriée des actifs et de la main-d’œuvre. Tout comme le franchisé d’une chaîne de restaurants, la relève agricole qui opte pour l’intégration doit accepter qu’une autre personne prenne des décisions, limitant ainsi sa participation à la gestion de l’entreprise.
À retenir : quand l’intégration représente un tremplin vers l’autonomie, la relève doit s’assurer que les termes du contrat sont clairement définis, particulièrement les clauses visant la possibilité de mettre fin à l’entente. Le contrat doit entre autres présenter les responsabilités des deux parties, la durée de l’entente, la possibilité de renégocier si de nouveaux frais s’ajoutent, l’indexation annuelle et les primes de rendement.
La bonne méthode pour le bon projet
Chaque projet d'établissement, avec ses objectifs et ses contraintes, est unique. Choisir un mode d'établissement adapté à votre situation, c’est faire un pas vers un projet réussi!
Pour vous soutenir, le MAPAQ met à votre disposition une foule de renseignements sur les divers modes d'établissement en agriculture. Consultez la section Options pour se lancer ou s'établir en agriculture.
Bon projet d’établissement!
Stratégie d'établissement |
Chaudière- Appalaches |
Ensemble du Québec |
Expansion ou diversification de l'entreprise |
54,2 % |
50,7 % |
Location d'actifs agricoles |
23,1 % |
24 % |
Contrat avec un intégrateur |
8,7 % |
8,6 % |
Transfert familial d'actifs agricoles |
67,5 % |
63,5 % |
Source : MAPAQ. Faits saillants de la Chaudière-Appalaches. Recensement de la relève agricole établie, 2008, graphique 5.
Note : le total des colonnes surpassent 100 % compte tenu de la possibilité de combiner plusieurs stratégies d’établissement pour un même projet.
Carole Bouffard, agronome
Conseillère, Saint-Georges
Août 2010